Nous sommes au mois de mai 2016 dans la région du Lac au Tchad, plus précisément au camp de Daresalam, des réfugiés ayant fui les atrocités de la secte Nigériane Boko Haram. En cette fin de matinée, l'air est très chaud. Mariam Assafi, une jeune fille d'une vingtaine d'années, l'air timide, est assise sur une chaise à l'entrée de la tente plantée par l'UNFPA et servant de clinique de prestations de services de santé de la reproduction. Elle attend son tour pour être reçue par la sage-femme pour la Consultation Prénatale.
Mariam, nomade de son état, ne vit pas dans le camp de Daresalam mais y vient fréquemment pour la Consultation Prénatale dans « la clinique » de l'UNFPA. En effet, à 25 ans révolus, Mariam, déjà mère de deux enfants est encore en grossesse de 32 semaines.
Passant sans transition d'un sourire en coin à une mine grave, Mariam raconte émue, comment sa première grossesse contractée alors qu'elle n'avait que 15 ans suite à un mariage forcé, avait failli se solder par des complications pouvant entrainer sa mort et celle de son bébé.
Cinq mois après l'accouchement laborieux, son mari quitta le Tchad pour se retrouver du côté de la Libye où il est commerçant.
Au retour de son mari après une absence de 10 ans, Mariam contracta sa deuxième grossesse et accoucha d'un garçon actuellement âgé de 2 ans. Juste après la naissance de ce deuxième enfant, elle fût traumatisée par le décès des suites d'un troisième accouchement d'une de ses tantes. Pour elle, « ce que les mamans racontent souvent n'a pas de sens. Pour preuve, même après plusieurs accouchements qui se passent bien comme dans le cas de ma tante, une femme peut bien avoir une grossesse à risque si elle ne se fait pas suivre dans une structure de santé par le personnel qualifié».
C'est pourquoi, depuis qu'elle est à nouveau enceinte, elle est devenue une cliente assidue de la « clinique » de l'UNFPA du camp de Daresalam pour les séances de Consultation Prénatale. Elle confie qu'elle a essuyé les réprimandes de son entourage, notamment de sa propre maman quand elle lui annonça qu'elle venait se faire suivre dans ce « centre de santé ». En effet, les deux précédents accouchements de Mariam s'étaient ‘'bien passés'' en dehors des structures de santé au gré des pérégrinations liées à leur vie de nomade. La mort de sa tante l'a convaincu à changer de comportement. Aussi, est-elle plus que déterminée à aller de l'avant pour sauver sa vie et celle de ‘'l'enfant'' qu'elle porte dans son ventre depuis 32 semaines. « Ma vie et celle de mon enfant valent plus que tout ce que peut me faire ma famille comme réprimandes » lança-t-elle, l'air déterminée. Elle l'a affirmé de vives voix à la Sage-Femme qui la consultait.
« Je continuerai à venir me faire suivre jusqu'à mon accouchement pour la première fois dans un centre de santé par un personnel qualifié. Je suis confiante quant à ma survie et celle de mon futur bébé ».